De facto n°17 | Mars 2020

17 | Mars 2020 

Jeunes en migration, entre défiance 

et protection 

La migra­tion des mineurs a pris les dimen­sions d’une véri­table crise ces dernières années. Les « mineurs non accom­pa­gnés » (MNA) migrants de moins de 18 ans, origi­naires de pays hors de l’Union euro­péenne et qui se trouvent sur le terri­toire fran­çais sans la protec­tion de leurs parents repré­sen­taient 2 555 enfants accueillis à l’Aide sociale à l’enfance (ASE) en 2012, et 17 022 en 20181. Ces chiffres, en termes absolus, demeurent modestes comparés à la popu­la­tion fran­çaise, ou même aux flux migra­toires. C’est bien à une « crise de l’accueil » que l’on est confronté, mettant à l’épreuve les dispo­si­tifs ordi­naires de prise en charge. Alors que l’Institut des Migra­tions initie une recherche en parte­na­riat avec le Conseil Dépar­te­mental de la Seine Saint-Denis, ce numéro de De Facto offre une vision géné­rale du parcours des jeunes en migra­tion, entre défiance et protection.

Les causes de la migra­tion de ces jeunes sont complexes, liées aux contextes poli­tiques, écono­miques et fami­liaux de pays traver­sant de profondes trans­for­ma­tions des rôles sociaux, comme en Afrique de l’Ouest, dont sont origi­naires les deux tiers des MNA pris en charge en France2. Les routes de cette migra­tion sont aussi complexes : ces jeunes arrivent souvent par voie aérienne, au terme de parcours discon­tinus, dont la trajec­toire dépend de ressources fami­liales dispa­rates. Le cadre légis­latif préco­nise de les protéger en tant qu’enfants. Pour­tant, comme il s’agit majo­ri­tai­re­ment d’adolescents qui, pour beau­coup ne détiennent pas de papiers d’identité, ils sont soup­çonnés de mentir sur leur âge pour obtenir un trai­te­ment plus favo­rable. Dans les dispo­si­tifs d’évaluation de la mino­rité s’installent alors des pratiques restric­tives liées aux logiques du contrôle migra­toire, qui fragi­lisent cette protection.

Yasmine Bouagga, respon­sable scien­ti­fique du numéro

2 Ibid.