Coordonné par Emeline Zougbédé et Stefan Le Courant
Des travaux en anthropologie ont pu analyser la migration comme un « rite de passage » : le courage face aux épreuves, le dévouement au travail, la frugalité, la capacité à envoyer de l’argent au pays sont autant de démonstrations de la capacité à endosser le rôle du breadwinner. Migrer est alors le détour nécessaire qui confère le pouvoir de se marier et permet ainsi d’accéder pleinement au statut d’homme. Le même type de masculinité virile a été mise en lumière à travers la figure narrative de « l’aventurier » dont le mérite se mesure à la hauteur des dangers encourus au cours de sa migration. Mais que devient l’ancien « aventurier » une fois parvenu au terme de son voyage ? Quels types d’expériences et quels types de masculinités sera-t-il en mesure d’incarner s’il devient un travailleur déclassé exposé aux discriminations raciales, un « sans-papiers » ou un entrepreneur à succès ? Si elle peut être synonyme de succès, la migration expose aussi – et parfois dans le même temps – aux expériences de minoration. La confrontation aux politiques répressives, aux expériences de mise à l’écart devient autant de sources d’incapacité et de production d’impuissance. La migration met ainsi la masculinité en tension et, entre ici et là-bas, les migrants sont susceptibles d’en incarner bien des déclinaisons. Ce numéro de De Facto invite non seulement à interroger l’universel du masculin migrant mais également à relire le fait migratoire sous l’angle du genre, sans cesse en recomposition.
Sommaire
De l’éloge à la critique : quand les femmes chantent la migration des hommes
Aïssatou Mbodj-Pouye, anthropologue
Comment penser le genre masculin comme performance sociale, historique et culturelle ?
Mélanie Gourarier, anthropologue
Delphine Peiretti-Courtis, historienne
Elsa Tyszler, sociologue
Vincent Gay, sociologue