Bienvenue au ciné-club de l’Institut Convergences Migrations ! #4

En atten­dant la reprise de ses programmes habi­tuels, l’Institut Conver­gences Migra­tions vous propose son ciné-club en ligne, en prolon­ge­ment du cycle « Migra­tions : des films et des cher­cheurs ». Partons à la (re)découverte de films d’hier et d’aujourd’hui : récits d’exil et de fron­tières, mais aussi d’amour et d’hospitalité.

Cette quatrième séance nous plonge dans le Paris du début des années 1970 où des Latinos améri­cains, notam­ment chiliens, entament sous le regard incisif de Raoul Ruiz leur Dialogue d’exilés. Ce film a été récem­ment restauré au Labo­ra­toire Mikros par la Ciné­ma­thèque française.

À propos du film

Ce film porte bien son titre : dès la première scène, les dialogues le font avancer. Ils posent les situa­tions, ils enri­chissent l’image, ils donnent des couleurs aux person­nages. Ces dialogues sont le « flot de conscience » d’un auteur, d’un réali­sa­teur, d’un mili­tant poli­tique et d’un théo­ri­cien du cinéma.

Le premier film tourné en France de Raoul Ruiz explore cet espace inter­sti­tiel de l’exil. Il se déroule dans des appar­te­ments pari­siens où l’on vit à plusieurs, où trônent des affiches d’Allende et de Camilo Torres, où des portes s’ouvrent et se referment, comme les espoirs et les attentes de ces exilés. 

On y voit les « boîtes à chaus­sures », les immenses tours de la grande ville, construites par les travailleurs afri­cains « pour le béné­fice du capi­ta­lisme fran­çais », comme disent les personnages.

Ce film, ni fiction, ni docu­men­taire, rappelle davan­tage les exer­cices visuels et poli­tiques d’un Chris Marker, avec l’intelligence et l’humour, c’est-à-dire la distance, dans son propos. On n’y défend pas une thèse poli­tique, mais on en illustre plusieurs ; on ne parle pas de l’identité chilienne, on la fait danser. Les Fran­çais sont bien inten­tionnés mais cela ne suffit pas ; les Brési­liens jouent les jour­na­listes curieux mais « personne n’a jamais rien compris au Chili, alors arrêtez l’interview ». Il y a une grande conscience poli­tique, mais le film est aux anti­podes du film partisan.

Si, en 1974, il a pu déranger, en 2020, il se regarde avec grand plaisir, d’autant plus que d’autres exilés latino-améri­cains ont pu s’y reconnaître.

Olga Gonzalez, fellow de l’Ins­titut Conver­gences Migrations

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