De facto #38 — « People not numbers » : Retrouver la trace des morts aux frontières

Dirigé par Filippo Furri et Linda Haapajärvi

À l’heure où la promesse d’une ferme­ture des fron­tières aux migrants inter­na­tio­naux vient d’amener l’extrême droite aux portes du pouvoir dans plusieurs pays euro­péens, il est urgent d’interroger le coût humain de l’endurcissement des poli­tiques de contrôle des fron­tières. Aujourd’hui, la migra­tion irré­gu­la­risée est le contexte dans lequel se produisent les trois quarts des dispa­ri­tions signa­lées au Comité Inter­na­tional de la Croix-Rouge. Des 65 000 personnes dispa­rues ou décédés sur les routes migra­toires comp­ta­bi­li­sées depuis 2014 par l’Organisation inter­na­tio­nale pour les migra­tions (OIM), la moitié ont péri dans la Médi­ter­ranée. Autre­ment dit, les restric­tions des poli­tiques des fron­tières de l’Union euro­péenne ont d’ores et déjà trans­formé les fron­tières externes de l’Europe d’un espace de transit rapide en un lieu de survie, où les migra­tions se réalisent au risque d’en mourir.

Depuis une ving­taine d’années, ces décès mobi­lisent un ensemble d’acteurs soucieux d’établir la vérité sur les causes et consé­quences des tragé­dies humaines qui se déploient aux fron­tières qui séparent les pays d’Europe de leurs voisins du sud et du sud-est. Ce numéro de De facto rassemble des articles qui mettent en valeur les savoirs aujourd’hui acquis sur cette face sombre des poli­tiques euro­péennes qui, toute­fois, peinent à provo­quer des réformes infor­mées par les faits et respec­tueuses des prin­cipes d’humanité, d’égalité et d’État de droit. Les six contri­bu­tions jettent la lumière sur la multi­pli­cité de manières dont les acti­vistes et les cher­cheurs, les artistes et les proches des disparus, tâchent de produire des savoirs sur ceux qui n’ont pas survécu aux chemins migra­toires. Il peut s’agir de chif­frer les disparus, mettre en récit les décès ou encore de commé­morer les victimes afin de mieux agir ensemble au nom de la justice.

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Sommaire

Sur le terrain
Établir les faits de mort et de dispa­ri­tion de migrants aux fron­tières du Nord global

Paola Díaz, socio­logue et Anna Rahel Fischer, juriste

Grief acti­vism and the crea­tion of commu­ni­ties across borders
Inter­view with Maurice Stierl, socio­lo­gist and geographer

Caro­lina Kobe­linsky, anthropologue

En chiffres
Morts aux fron­tières : les ambi­guïtés des chiffres
Antoine Pécoud, sociologue

Focus
Calais, fron­tière meurtrière
Maël Galisson, journaliste

En images
« Le passage » : Aiguiller la mémoire des morts des frontières
Mari­jana Hameršak, cher­cheuse en études litté­raires et culturelles