AAC : Dossier « Les intermédiaires de la migration », Revue Européenne des Migrations Internationales — LIMITE : 01/​09/​2022

Présen­ta­tion

La rhéto­rique poli­tique et média­tique en Europe ou en Amérique du Nord réduit la caté­gorie des inter­mé­diaires des migra­tions à celle des « passeurs ou des trafi­quants, décrits comme cupides et peu scru­pu­leux » (Dubet, 2018). Cette figure, floue et réduc­trice, parti­cipe de légi­timer les poli­tiques répres­sives et huma­ni­taires à l’égard des personnes en migra­tion qui mobi­lisent alors diffé­rentes ressources, réseaux et stra­té­gies pour parvenir à circuler en prenant souvent toujours plus de risques. Se contenter de cette lecture qui fait de la ques­tion migra­toire une crise à résoudre (Leconte et al., 2019) occulte inévi­ta­ble­ment la diver­sité des acteurs impli­qués dans la « mondia­li­sa­tion migra­toire » (Simon, 2008). La complexité de leur rôle, de leurs inté­rêts et de leurs actions s’en trouve éludée, alors même qu’elle traverse de nombreuses insti­tu­tions, et ce jusqu’aux États eux-mêmes. Ces derniers contri­buent en effet par les poli­tiques déployées et les traités signés parfois au détri­ment du droit inter­na­tional, à des fins de contrôle, de répres­sion, mais aussi de gestion et d’encadrement de la main‑d’œuvre, à favo­riser l’émergence d’une myriade d’acteurs indis­pen­sables au mouve­ment comme à l’installation.

Calen­drier

  • Lance­ment de l’appel : 15 juin 2022
  • Récep­tion des propo­si­tions résu­mées et clôture de l’appel : 1er septembre 2022
  • Déci­sion : 30 septembre 2022
  • Récep­tion des articles par les coor­di­na­trices : 1er décembre 2022
  • Récep­tion des articles dans leur version défi­ni­tive : 1er mai 2023
  • Paru­tion du dossier : septembre 2023

Moda­lités de soumission

Les propo­si­tions résu­mées d’articles peuvent être rédi­gées en fran­çais ou en anglais et devront comprendre l’affiliation de l’auteur·e, une propo­si­tion de titre et un résumé de 1 000 carac­tères (espaces compris). Elles peuvent émaner de diffé­rentes disci­plines des sciences sociales, et sont à envoyer à assaf.​dahdah@​cnrs.​fr, kevin.​mary@​univ-​perp.​fr et olivier.​clochard@​univ-​poitiers.​fr avant le 1erseptembre 2022.

Les articles acceptés pour­ront être rédigés en fran­çais, anglais ou espagnol.

Pour plus de détails (normes, nombre de carac­tères, présen­ta­tion, etc.) : https://​jour​nals​.opene​di​tion​.org/​r​e​m​i/5848

Comité de sélection/coordinateur·rice·s du dossier

Dahdah Assaf (géographe, Chargé de recherche CNRS à l’UMR ART-Dev, Montpellier)

Mary Kevin (géographe, MCF à l’Université de Perpi­gnan Via Domitia et UMR CNRS ART-Dev et membre de l’Institut Conver­gences Migrations)

Clochard Olivier (géographe, Chargé de recherche CNRS à l’UMR Migrinter et membre de l’Institut Conver­gences Migrations)

Dates

La date finale de récep­tion des propo­si­tions résu­mées est le 01/​09/​2022.

Contacts

remi@​univ-​poitiers.​fr

Argu­men­taire

La rhéto­rique poli­tique et média­tique en Europe ou en Amérique du Nord tend à réduire la caté­gorie des inter­mé­diaires dans les mouve­ments migra­toires à celle des « passeurs ou des trafi­quants, inévi­ta­ble­ment décrits comme cupides et peu scru­pu­leux » (Dubet, 2018). Cette figure décrite ainsi comme malfai­sante reste cepen­dant rela­ti­ve­ment floue et réduc­trice. Elle parti­cipe en revanche de légi­timer — derrière leur pendant que sont le discours et l’action huma­ni­taires (Brunet-Jailly, 2007) — les poli­tiques répres­sives et restric­tives à l’égard des personnes en migra­tion qui mobi­lisent alors diffé­rentes ressources, réseaux et stra­té­gies pour parvenir à circuler malgré tout, en prenant souvent toujours plus de risques. Se contenter de cette lecture qui fait de la ques­tion migra­toire un enjeu huma­ni­taire et sécu­ri­taire, et in extenso une crise à résoudre (Leconte et al., 2019) notam­ment par l’érection de nouveaux camps, de nouvelles barrières et l’usage de nouvelles tech­no­lo­gies de contrôle, occulte inévi­ta­ble­ment la diver­sité des acteurs impli­qués dans la « mondia­li­sa­tion migra­toire » (Simon, 2008). La complexité de leur rôle, de leurs inté­rêts et de leurs actions s’en trouve éludée, alors même qu’elle traverse de nombreuses insti­tu­tions, et ce jusqu’aux États eux-mêmes. Ces derniers contri­buent en effet par les poli­tiques déployées et les traités signés parfois au détri­ment du droit inter­na­tional, à des fins de contrôle, de répres­sion, mais aussi de gestion et d’encadrement de la main‑d’œuvre, à favo­riser l’émergence d’une myriade d’acteurs indis­pen­sables au mouve­ment comme à l’installation.

Dans ce contexte, le recours aux inter­mé­diaires dans la migra­tion, s’il est loin d’être nouveau, a pris une impor­tance crois­sante depuis une tren­taine d’années (Jones et al., 2017 ; Xiang et Lind­quist, 2014). En Asie notam­ment, un nombre toujours plus impor­tant de personnes doivent s’adjoindre les services d’intermédiaires payants s’ils souhaitent migrer (Lind­quist et Xiang, 2019 ; Spaan, 1994). Les raisons d’un tel engoue­ment sont de plusieurs ordres. Il est d’abord lié au durcis­se­ment des poli­tiques migra­toires qui, par des processus de filtrage, de contrôle voire de ferme­ture, rendent le passage des fron­tières toujours plus diffi­cile (Ayalew et al., 2018 ; Spener, 2004), contri­buant à un « cloi­son­ne­ment du monde » (Rosière, 2020). Il est ensuite conco­mi­tant de la priva­ti­sa­tion crois­sante du mana­ge­ment des migra­tions (Gammel­toft-Hansen et Sorensen, 2013), elle-même insérée dans un contexte néo-libéral plus global qui engendre une véri­table « indus­trie de la migra­tion » (Hernández-León, 2012). Ces dyna­miques produisent in fine une demande struc­tu­relle en inter­mé­diaires : d’une part des États qui sous-traitent l’organisation et la répres­sion de la circu­la­tion et d’autre part des personnes souhai­tant migrer qui sont en lien avec d’autres inter­mé­diaires afin de faci­liter le passage des fron­tières (Faist, 2014).

Si la ques­tion des inter­mé­diaires est désor­mais cruciale pour mieux comprendre les migra­tions inter­na­tio­nales contem­po­raines, la litté­ra­ture sur le sujet est très large­ment anglo­phone et les études fran­co­phones restent à la fois rares et éparses. À ce titre, la REMI a proposé une première réflexion sur le sujet à travers l’article de Linquist et Xiang (2019), mais en l’état aucune revue fran­co­phone ne s’est encore attelée spéci­fi­que­ment à cette ques­tion. L’objectif de ce dossier théma­tique sera donc de regrouper des textes centrés sur la figure des inter­mé­diaires afin d’en saisir à la fois les ancrages théo­riques et les avan­cées empiriques.

Les inter­mé­diaires dans la litté­ra­ture sur les migra­tions inter­na­tio­nales : entre moyen d’émigration et inter­mé­dia­tion sociale d’intégration

La figure des inter­mé­diaires émerge dans les années 1970 à travers les travaux pion­niers de Massey et al. (1988) sur les réseaux migra­toires. Ces recherches se situent à l’échelle « méso » et mettent en avant les liens de soli­da­rité exis­tant notam­ment dans les familles qui permettent l’accès non seule­ment à la migra­tion, mais égale­ment l’aide durant l’ensemble du processus d’installation des migrants dans les pays d’accueil (Aude­bert, 2004). De ces études ressort parti­cu­liè­re­ment l’aspect altruiste des moti­va­tions des divers inter­mé­diaires qui agissent dans des cadres large­ment infor­mels, délais­sant par la même le rôle et le poids des enjeux finan­ciers dans ces contextes d’entraide (Goss et Lind­quist, 1995).

En réponse à ces critiques, le concept d’« indus­trie de la migra­tion » émerge à partir des années 1990 pour évoquer « la commer­cia­li­sa­tion de la mobi­lité humaine » (Hernández-León, 2012). Il envi­sage donc les migra­tions comme une économie incor­po­rant des insti­tu­tions, des agents, des entre­pre­neurs et des indi­vidus qui proposent des services faci­li­tant la migra­tion en contre­partie d’un gain moné­taire (Bilger et al., 2006). Ces recherches, essen­tiel­le­ment empi­riques, ont en parti­cu­lier docu­menté l’identité des acteurs qui peuvent être quali­fiés d’intermédiaires, montrant qu’ils peuvent relever à la fois des sphères du formel et de l’informel (Salt et Stein, 1997) et qu’ils ne faci­litent pas toujours la migra­tion, mais peuvent, pour certains d’entre eux, au contraire l’empêcher voire la bloquer (Gammel­toft-Hansen et Sorensen, 2013).

Pour autant, ces travaux butent encore sur des diffi­cultés liées notam­ment au très grand nombre d’acteurs qui peuvent être iden­ti­fiés comme étant des inter­mé­diaires et des nombreuses termi­no­lo­gies qui leur sont asso­ciées en fonc­tions des contextes (Jones et Sha, 2020). « Aidants », « passeurs », « cour­tiers », « consul­tants », « recru­teurs », « coyotes » en Amérique latine ou encore « coxeurs » en Afrique de l’Ouest traduisent ainsi les déno­mi­na­tions hété­ro­clites qui quali­fient ces acteurs tout comme la diver­sité de leurs fonc­tions. Certains auteurs proposent de se foca­liser plutôt sur le travail des inter­mé­diaires et l’observation de leur rôle concret dans le processus migra­toire (Spener, 2009). Ces travaux ont pu montrer que les inter­mé­diaires ont avant tout une influence sur l’action de migrer ou non. Mais ils ont égale­ment rappelé que l’intermédiation relève en général de deux dimen­sions distinctes : l’intermédiation comme vecteur et moyen d’émigration et l’intermédiation sociale d’intégration.

Dans le premier cas de figure, les inter­mé­diaires agissent en général plutôt en amont du processus migra­toire et influent sur les desti­na­tions des migrants, tout comme les recru­te­ments dans certains secteurs écono­miques. Dans le second cas, ils jouent un rôle impor­tant dans l’installation et l’intégration des migrants dans les pays de transit et de desti­na­tion — qu’ils soient asso­cia­tions, familles d’accueil, mili­tants ou encore réseaux fami­liaux ou plus large­ment commu­nau­taires. Plusieurs travaux ont déjà su docu­menter ce rôle dans l’intégration des migrants, et ce dans divers contextes, qu’ils soient occi­den­taux (Pette, 2014 ; Harney, 1979) ou dans les Suds (Barraud, 2011 ; Pian, 2008). Enfin, nous ajou­te­rons à cette liste tous ces acteurs privés recrutés pour le bon fonc­tion­ne­ment de cette « indus­trie de la migra­tion » dans son volet admi­nis­tratif — par exemple les services auprès desquels il est désor­mais obli­ga­toire de déposer son dossier pour toute demande de visa —, et dans son volet poli­cier voire mili­taire — à l’image des entre­prises béné­fi­ciant de contrats pour la construc­tion des barrières et pour le déve­lop­pe­ment des tech­no­lo­gies pour le contrôle des identités.

Ce dossier théma­tique a pour ambi­tion d’interroger la figure des inter­mé­diaires en insis­tant sur plusieurs aspects en lien avec les muta­tions sociales, écono­miques et poli­tiques actuelles, sans écarter pour autant les contri­bu­tions suscep­tibles de mettre en lumière la profon­deur histo­rique des processus à l’œuvre. Il aura ainsi pour ambi­tion de recueillir des contri­bu­tions trai­tant de contextes natio­naux et régio­naux divers afin de dégager à la fois les spéci­fi­cités et les aspects plus struc­tu­rels suscep­tibles de ressortir d’une lecture globale qui montre combien, à l’échelle de la planète, la ques­tion migra­toire se trouve prise en étau entre les logiques répres­sives et libérales.

Le rapport à l’État des intermédiaires

L’État occupe une place centrale dans les processus auxquels se rattachent les inter­mé­diaires. Il se révèle être un acteur rela­ti­ve­ment ambigu qui à la fois légi­time et crimi­na­lise l’économie — ou busi­ness — de la migra­tion (Kim, 2018). Il faci­lite égale­ment, par ses poli­tiques, l’entrée de certaines caté­go­ries de migrants au détri­ment d’autres (Spaan et Naerssen, 2018). Il s’inscrit en cela dans une logique néo-libé­rale au sein de laquelle l’État sauve­garde et promeut les méca­nismes du marché (Pinson, 2020 : 15). Par son action, l’État en vient aujourd’hui en effet à décom­poser les parcours migra­toires. L’émergence de tout un ensemble d’institutions publiques comme privées (centres de trai­te­ment de demande de visas, services publics déma­té­ria­lisés, etc.) crée un écosys­tème bureau­cra­tique dans lequel se déve­loppent et naviguent les inter­mé­diaires, qui deviennent des acteurs incon­tour­nables des processus migra­toires, jusqu’à parfois contri­buer à la produc­tion du droit de la migra­tion et à sa redé­fi­ni­tion (Miaz et al., 2021 : 9). Les contri­bu­tions pour­ront ainsi inter­roger la place de l’État à travers le travail des inter­mé­diaires et les rela­tions qu’entretiennent ces derniers avec l’État.

Les réseaux et leurs acteurs

La notion de réseau s’avère très mobi­lisée, bien que l’on n’en saisisse bien souvent pas vrai­ment la nature, le fonc­tion­ne­ment, les logiques, ni l’importance en tant que ressource pour les personnes en migra­tion. Contras­tant avec le réseau « mafieux » ou le terme de « filière » (Casella Colom­beau, 2017) géné­ra­le­ment invoqué pour se main­tenir dans le registre répressif et disqua­li­fier la capa­cité des personnes à élaborer des stra­té­gies pour se mouvoir, les contri­bu­tions pour­ront s’intéresser ici aux manières dont les réseaux, qu’ils soient de nature diaspo­rique, fami­liale, villa­geoise, amicale, asso­cia­tive et poli­tique, sont orga­nisés et mobi­lisés dans le cadre du mouve­ment comme de l’installation (Béteille, 1974). En sorte que le réseau peut être qualifié de système d’intermédiaires dont les analyses s’attacheront à en décrypter le fonctionnement.

Migra­tion et gestion de la main‑d’œuvre quali­fiée et non quali­fiée : une myriade d’intermédiaires publics et privés

L’intermédiation dans le domaine du recru­te­ment de la main‑d’œuvre est un phéno­mène à la fois ancien, global et persis­tant (Bosma et al., 2013). À l’image des travailleurs recrutés en Europe via « les contrats à durée déter­minée, les missions en intérim, le portage sala­rial, le déta­che­ment […] par une entre­prise étran­gère, les contrats saison­niers » (Morice et Potot, 2010) ou des ouvriers et des domes­tiques asia­tiques exportés au Moyen-Orient enca­drés par le système de la kafala (Dahdah, 2020 ; Bruslé, 2015), la mondia­li­sa­tion migra­toire s’inscrit dans une nouvelle divi­sion inter­na­tio­nale du travail impli­quant le recru­te­ment, la forma­tion et la gestion d’hommes et de femmes desti­nées à circuler pour travailler à moindres coûts, à renvoyer des devises vers leur pays d’origine avant d’être à leur tour renvoyés dans le cadre d’un turn over évitant l’installation des « indé­si­rables » (Agier, 2008 ; Bruslé, 2015). La main‑d’œuvre plus quali­fiée n’est pas non plus exclue de ces logiques, comme en témoignent les programmes dits de migra­tion « choisie » souhai­tant attirer des travailleurs étran­gers dans des secteurs clés capables de stimuler la crois­sance écono­mique (Pellerin, 2011) ou encore l’attraction d’étudiants étran­gers aujourd’hui syno­nyme d’attractivité et de revenus supplé­men­taires pour les univer­sités (Garneau et Mazzella, 2013). Le recru­te­ment d’étudiants inter­na­tio­naux constitue à ce titre à la fois un champ de recherche en plein déve­lop­pe­ment et une « indus­trie émer­gente de la migra­tion » nourrie par le travail d’intermédiaires pour le recru­te­ment de candi­dats dans des univer­sités souvent privées (Baas, 2019 ; Mary, 2020 ; Robinson-Pant et Magyar, 2018 ; Huang et al., 2016). Ces formes de circu­la­tion sont enca­drées par la coopé­ra­tion entre auto­rités publiques des pays de départ et d’arrivée, et acteurs privés à l’instar des agences de recru­te­ment, des univer­sités, des entre­prises de gestion des camps et des employeurs. Admi­nis­tra­tions et auto­rités publiques comme acteurs privés intègrent ainsi ce pano­rama des inter­mé­diaires de la migra­tion. Les contri­bu­tions pour­ront ainsi inter­roger les liens parfois complexes entre insti­tu­tions privées et publiques dans le travail des intermédiaires.

Exter­na­li­sa­tion, répres­sion et contrôles aux fron­tières : une approche spatiale de l’intermédiarité

L’externalisation des fron­tières et les accords Schengen garan­tis­sant la liberté de circu­la­tion dans une partie de l’Europe ont eu tendance à occulter le rôle des auto­rités poli­cières euro­péennes dans la répres­sion des mouve­ments migra­toires vers l’Europe et à l’intérieur du conti­nent. Or, à l’image de la répres­sion à Calais ou de la gestion en appa­rence paci­fiée à Lampe­dusa (Guene­beaud et Lendaro, 2020), de la remise en place des contrôles aux fron­tières entre pays de la zone Schengen en 2015, mais égale­ment du discours sur le déploie­ment des agents Frontex en Europe et dans son voisi­nage (Ottavy et Clochard, 2014), les agents de police et les douanes, mais égale­ment les armées dans le cadre d’opérations en Médi­ter­ranée, les forces poli­cières et mili­taires ont été mises à nouveau sur le devant de la scène en tant qu’intermédiaires de la poli­tique répres­sive à l’égard de la migra­tion inter­na­tio­nale. Elles s’appuient pour se faire sur les tech­no­lo­gies déve­lop­pées par les indus­tries de l’armement alors desti­nées à l’érection de fron­tières, à leur surveillance et au contrôle des migrants et migrantes arrêtés. L’industrie de la fron­tière pour la répres­sion de la migra­tion repose alors sur la colla­bo­ra­tion d’intermédiaires que sont les auto­rités publiques et les inté­rêts privés (Rodier, 2012). En outre, à l’image des accords passés par les États-Unis avec le Mexique et par l’Union euro­péenne avec la Turquie, la Tunisie et le Maroc, l’externalisation fron­ta­lière, autre­ment dit le contrôle et le refou­le­ment, produit une nouvelle caté­gorie d’État que l’on pour­rait quali­fier d’État inter­mé­diaire, négo­ciant bon gré mal gré, dans le cadre de rapports de force géopo­li­tiques (Green­hill, 2010), la gestion admi­nis­tra­tive, poli­cière et huma­ni­taire des migrants sur son sol, mais aussi mena­çant de les laisser passer s’il n’obtient pas satis­fac­tion. Cet aspect rappelle l’un des registres de l’intermédiarité qui s’inscrit dans une approche réso­lu­ment spatiale (Merle, 2011 : 89).

Biblio­gra­phie

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