Polémique sur l’« islamo-gauchisme » : l’ICM s’associe au communiqué de la Conférence des présidents d’université

Le bureau de la coor­di­na­tion de l’Ins­titut Conver­gences Migra­tions salue sans réserve la ferme riposte de la Confé­rence des prési­dents d’uni­ver­sité (CPU) suite aux propos de la ministre de l’En­sei­gne­ment supé­rieur et de la recherche sur l’« isla­mo­gau­chisme » au sein des Universités.

« Islamo-gauchisme » : stopper la confusion et les polémiques stériles

Communiqué de la Conférence des présidents d’université (CPU), 16 février 2021

Inter­rogée sur CNews, la ministre de l’enseignement supé­rieur, de la recherche et de l’innovation a annoncé qu’elle allait demander « notam­ment au CNRS » de faire une enquête sur « l’ensemble des courants de recherche » à propos de « l’islamo-gauchisme » à l’université, « de manière à ce qu’on puisse distin­guer ce qui relève de la recherche acadé­mique et ce qui relève du mili­tan­tisme et de l’opinion ».

La CPU fait part de sa stupeur face à une nouvelle polé­mique stérile sur le sujet de l’« islamo-gauchisme » à l’université. « L’islamo-gauchisme » n’est pas un concept. C’est une pseudo-notion dont on cher­che­rait en vain un commen­ce­ment de défi­ni­tion scien­ti­fique, et qu’il convien­drait de laisser, sinon aux anima­teurs de Cnews, plus large­ment, à l’extrême droite qui l’a popu­la­risé. Utiliser leurs mots, c’est faire le lit des tradi­tion­nels procu­reurs prompts à condamner par prin­cipe les univer­si­taires et les universités.

Comme l’avait juste­ment rappelé dans une tribune le 26 octobre dernier la ministre de l’enseignement supé­rieur, de la recherche et de l’innovation, « l’université n’est ni la matrice de l’extrémisme, ni un lieu où l’on confon­drait éman­ci­pa­tion et endoc­tri­ne­ment. L’université n’est pas un lieu d’encouragement ou d’expression du fana­tisme, » mais « le lieu où s’apprennent le doute comme la modé­ra­tion ainsi que la seule de nos insti­tu­tions capable d’éclairer l’ensemble de la société, de l’école aux médias, par une connais­sance scien­ti­fi­que­ment établie, discutée et criti­quée collé­gia­le­ment. » Rien ne saurait justi­fier un chan­ge­ment de discours à ce sujet.

La CPU regrette donc la confu­sion entre ce qui relève de la liberté acadé­mique, la liberté de recherche dont l’évaluation par les pairs est garante, et ce qui relève d’éventuelles fautes ou d’infractions, qui font l’objet si néces­saire d’enquêtes admi­nis­tra­tives (par l’Inspection géné­rale de l’éducation, du sport et de la recherche), ou d’enquêtes pénales. La CPU s’étonne ainsi de l’instrumentalisation du CNRS dont les missions ne sont en aucun cas de produire des évalua­tions du travail des ensei­gnants-cher­cheurs, ou encore d’éclaircir ce qui relève « du mili­tan­tisme ou de l’opinion ». La CPU réclame, au minimum, des clari­fi­ca­tions urgentes, tant sur les fonde­ments idéo­lo­giques d’une telle enquête, que sur la forme, qui oppose CNRS et univer­sités alors que la recherche est menée conjoin­te­ment sur nos campus par les cher­cheurs et les enseignants-chercheurs.

La CPU appelle à élever le débat. Si le gouver­ne­ment a besoin d’analyses, de contra­dic­tions, de discours scien­ti­fiques étayés pour l’aider à sortir des repré­sen­ta­tions cari­ca­tu­rales et des argu­ties de café du commerce, les univer­sités se tiennent à sa dispo­si­tion. Le débat poli­tique n’est par prin­cipe pas un débat scien­ti­fique : il ne doit pas pour autant conduire à raconter n’importe quoi.