Municipales 2020 : immigrés et candidat.e.s d’origine asiatique dans Paris et sa banlieue

Baptiste Coulmont, sociologue

Lors des élections municipales de 2020, le nombre de candidats d’origine asiatique en Île-de-France a sensiblement augmenté. L’occasion de comparer ces chiffres à l’implantation de la communauté dans la région.

Les popu­la­tions d’origine chinoise, viet­na­mienne et cambod­gienne ne deviennent numé­ri­que­ment impor­tantes dans Paris et sa banlieue que depuis quatre décen­nies. Malgré le manque de sources, on entre­voit une évolu­tion dans leurs pratiques poli­tiques. C’est l’objet du projet Parti­ci­pa­tion poli­tique des popu­la­tions issues de l’immigration asia­tique en France (PolAsie). Sans attendre les résul­tats, on peut déjà souli­gner une corré­la­tion entre la répar­ti­tion géogra­phique des popu­la­tions concer­nées et les candi­da­tures aux élec­tions. Lors du recen­se­ment, les habi­tants de la France sont invités à indi­quer leur lieu de nais­sance mais pas celui des parents. On se concen­trera donc ici sur les immi­grés, sans pouvoir inclure les descen­dants nés en France.

La propor­tion des rési­dents d’Île-de-France nés en Chine, au Vietnam ou au Cambodge peut être estimée à l’échelle infra-commu­nale des IRIS, les Îlots regroupés pour l’information statis­tique (carte). Voisine de zéro dans la majeure partie du Grand Paris, elle se rapproche de 20 % dans quelques micro-quartiers.

À l’échelle de Paris et de sa proche banlieue, deux constats s’im­posent. Tout d’abord, la popu­la­tion concernée réside dans des quar­tiers qui comptent beau­coup d’immigrés : Belle­ville, dans le 19e arron­dis­se­ment, le long des 10e, 11e et 20e arron­dis­se­ments, et au-delà du péri­phé­rique, au nord-est de Paris, du côté d’Aubervilliers, La Cour­neuve et Bagnolet. Au sud, elle se concentre dans le 13e arron­dis­se­ment, ainsi que vers Ivry-sur-Seine et Évry. À l’opposé, toute­fois, nombreuses sont les loca­lités où la popu­la­tion immi­grée est impor­tante, mais avec très peu de personnes nées en Chine, au Cambodge ou au Vietnam. Ainsi le quar­tier de Barbès, dans le 18e arron­dis­se­ment, ou les communes de Saint-Denis ou Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis.

Lors des élec­tions muni­ci­pales de 2020, des candidat.e.s d’ori­gine asia­tique se sont présenté.e.s dans les quar­tiers où se concentre la popu­la­tion asia­tique (Données PolAsie). Près de 20 dans le 13e arron­dis­se­ment, près de 10 dans le 20e, une douzaine à Auber­vil­liers, près de 10 à Vitry, une poignée à Ivry, dans le 19e ou à la Cour­neuve… et très peu ailleurs. Ces chiffres ont été multi­pliés par trois depuis 2014. Même modestes — et le nombre d’élus l’est bien sûr encore plus —, ils attestent une poli­ti­sa­tion crois­sante des immi­grés comme des descen­dants. Les premiers ont un taux d’inscription limité à 70% (selon les Enquêtes Parti­ci­pa­tion élec­to­rale de l’Insee), car moins de la moitié sont fran­çais, ce qui affai­blit leur poids élec­toral. Mais on peut penser que les seconds, nés en France, sont davan­tage inscrits sur les listes électorales.

La corré­la­tion entre la présence d’une immi­gra­tion d’origine chinoise, viet­na­mienne ou cambod­gienne et l’émergence de candi­da­tures asia­tiques soulève une ques­tion : reflète-t-elle la volonté des partis de présenter des candi­da­tures plus repré­sen­ta­tives à l’échelle locale, ou s’agit-il d’un vote « commu­nau­taire », les Asia­tiques préfé­rant « voter asiatique » ?

Pour aller plus loin
  • Janelle Wong et al., Asian American Poli­tical Parti­ci­pa­tion : Emer­ging Consti­tuents and their Poli­tical Iden­ti­ties. New York, Russell Sage Foun­da­tion, 2011.
L’auteur

Baptiste Coul­mont est profes­seur des univer­sités à l’École normale supé­rieure Paris-Saclay.

Citer cet article

Baptiste Coul­mont, « Muni­ci­pales 2020 : immi­grés et candidat.e.s d’ori­gine asia­tique dans Paris et sa banlieue », in : Hélène Le Bail et Ya-Han Chuang (dir.), Dossier « Diaspora chinoise, géné­ra­tions, enga­ge­ment », De facto, n°23, nov. 2020. URL : https://www.icmigrations.cnrs.fr/2020/11/18/defacto-023–04/

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