- Éditeur : Travail, genre et sociétés, Rubrique « Controverses »
- Année : 2019
- Langue : français
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Présentation
« Le concept d’intersectionnalité a été introduit en 1989 dans les sciences sociales par Kimberlé Crenshaw pour théoriser une certaine approche du croisement des oppressions, en positionnant chaque individu à l’intersection des rapports sociaux de « race », de classe et de sexe, notamment [Crenshaw et Bonis, 2005]. À la fois outil, méthode et objet de recherche, l’intersectionnalité varie dans ses usages et ses définitions [Bilge, 2009, 2010 ; Palomares et Testenoire, 2011 ; Fassin, 2015] et se nourrit des critiques qui sont adressées, tantôt au terme lui-même [Kergoat, 2009 ; Bacchetta, 2015], tantôt à ses appropriations au sein des sciences sociales [Ait Ben Lmadani et Moujoud, 2012 ; Fassa, Lépinard et Roca I Escoda, 2016].
Jusqu’à récemment, la question de l’intersectionnalité des rapports de domination n’avait pas été posée en tant que telle dans les travaux sur l’École. Les journées d’études scientifiques « Penser l’intersectionnalité dans les recherches en éducation », organisées les 18 et 19 mai 2017 à l’École supérieure de professorat et de l’éducation (espe) de Créteil, visaient à examiner l’intérêt de prendre en compte cette perspective dans les recherches sur le système scolaire [Belkacem, Chapuis et Gallot, 2017]. Mais, lors de la communication du programme sur des listes de diffusion scientifique, nous avons été interpellées violemment sur les réseaux médiatiques et politiques, en tant qu’organisatrices et membres du conseil scientifique du colloque. Ces vives réactions ont failli conduire à l’interdiction de l’événement, remettant ainsi en cause la liberté de la recherche scientifique . Quelques mois plus tard, en octobre 2017, un colloque organisé à l’université de Lyon 2, « Lutter contre l’islamophobie : un enjeu d’égalité ? », a été, lui, annulé à la suite d’attaques comparables sur les réseaux sociaux notamment. La polémique ressurgit quelques semaines plus tard, sur les mêmes réseaux, au sujet d’un stage syndical organisé par Sud éducation 93 sur le thème : « Au croisement des oppressions. Où en est-on de l’antiracisme à l’école ? ». Les chercheur·e·s invité·e·s à présenter l’état de la littérature sur ces questions sont discrédité·e·s publiquement. Deux ateliers en non-mixité (l’un sur les expériences d’« enseignant·e·s racisé·e·s », l’autre sur la déconstruction des « préjugés de race, de genre et de classe ») sont placés au centre de la polémique. Une plainte est alors déposée par le ministre de l’Éducation pour l’usage du concept de « racisme d’État ». »
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Sommaire
- Lila Belkacem, Fanny Gallot et Nicole Mosconi : « Penser l’intersectionnalité dans le système scolaire ? », p.147–152
- Alain Beitone et Estelle Hemdane : « L’origine sociale, facteur principal des inégalités scolaires », p.153 à 158
- Françoise Lorcerie : « Pour une approche intersectionnelle à l’École », p. 159–165
- Fabrice Dhume : « En finir avec la concurrence des rapports sociaux », p. 167 à 173
- Nassira Hedjerassi : « Sortir des sentiers battus : une trajectoire de recherches en éducation », p. 175 à 180
- Rebecca Rogers : Entretien avec Kate Rousmaniere, « Gender, Class and Race », quelle intersectionnalité dans l’histoire de l’éducation aux États-Unis ? », p. 181 à 184
Coordinatrices du dossier thématique
- Lila Belkacem (ICM)
- Fanny Gallot
- Nicole Mosconi